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Canal synthétique de la IIème Internationale Situationniste Immédiatiste.

mercredi 28 mars 2012

Priscilla Bisiaux - ou sur la poétique comme vision ou comme narcissisme .

Lhermitte Charles Augustin (1881-1945)


Comme elle m'a dit, si elle meurt aujourd'hui elle sait qu'au temps passé, elle aura tout pris .
Je crois bien que moi aussi
.
Priscilla Bisiaux

L'Encyclopédie aujourd'hui publie une voix discrète, une petite voix rencontrée par hasard dans les labyrinthes des mondes numériques : Priscilla Bisiaux . Cette jeune fille a échoué dans un baccalauréat technologique et a fait ensuite un CAP de métallier en apprentissage . Qu'une jeune fille dresse le fer comme d'autres dressent des fauves, le fer noir emblème de notre âge, me plaît .

Sa poésie est difficile par sa simplicité et par sa nudité : les hommes raffinés ne peuvent peut-être pas spontanément la goûter . Je ne voudrais pas que la petite musique mélancolique de Priscilla soit méprisée . Elle ne le mérite pas, par sa sincérité et son humanité, mais aussi parce qu'elle atteint déjà, parfois, à une puissance que peu de poètes atteignent par leurs efforts .

Elle paraît très simple, mais elle résulte d'un travail, d'un murissement, d'une élaboration . Pourtant on y trouve cette musique étrangement mélancolique, et aussi l'expression mêlée de l'oppression ouvrière dans ce monde où trop de mandarins croient finie la lutte des classes . La lutte des classes, oui, car les pauvres sont vaincus et humiliés dans le cadre du Système et de l'idéologie régnante ; mais pas la réalité des classes et la réalité de l'exploitation de l'homme .

Lentement, ce n'est plus l'homme qui exploite l'homme, mais le Système qui l'exploite – et ainsi même les petites et moyennes bourgeoisies, lentement, insidieusement, versent vers la vie dans l'exploitation, l'hyper-encadrement légal, la répression masquée par la morale . L'exploitation insidieuse s'étend indéfiniment . Les ouvriers restent exploités de manière plus crue, dans des métiers qu'ils abhorrent .

pendant longtemps, je l'ai vu, se lever comme par obligation
il enfilé sa tenue, qu'il portait que pour l'occasion
tous les matins il s'en allait loin de nous loin de notre foyer
pour aller gagner de l'argent dans un métier qu'il abhorrait


Ce qui m'a frappé dans ces textes, dès l'abord, c'est l'expression de l'absurdité du monde moderne, la recherche d'expression du vide moderne par des énoncés simples :

Gagner 500€/mois et en dépenser 300 dans une paires de chaussures.
S'offrir une moto et économiser sur la nourriture.
Passer des heures sur internet et ne pas avoir d'amis.
Être quelqu'un grâce au titre que l'on se donne et ne pas savoir qui l'on est.
Regarder "j'te montre ma vie à la TV" et ne pas discuter à table
.

Bien sûr, on retrouve cela théorisé dans les premières phrases de la Société du Spectacle de Guy Debord . Mais la force de ces simples énoncés, c'est qu'ils sont des vestiges immédiats d'expériences vécues, dont l'absurdité se montre dans leur description même, sans passer par aucun lyrisme . La chanson celtique traditionnelle fait couramment usage de tels procédés :

At the âge of sixteen he was a married man
At the âge of seventeen a father to a son
.

Ces énoncés sont l'énonciation simple, directe du destin . Ils expriment non la douleur ou le ressentiment, mais simplement la réalité du monde, laissant à tout homme, à tout frère d'humanité, le pouvoir d'écouter et de ressentir la douleur occultée dans le cœur . Ce ne sont pas des poésies lyriques parce que le narcissisme moderne, celui qui dit je et parle de ressenti de l'ego, est spontanément absent . Cette absence est comme l'absence du coquillage, elle n'est pas l'absence de chair palpitante, mais l'indice d'une vie trop dure pour être pleinement ressentie en mode narcissique sans blesser la vie même . Alors l'être humain se protège de son humanité de sang et forge son image de fer, tant pour autrui que pour lui-même . Car comment vivre sans blesser de manière vitale sa chair de telles vies, l'homme marié à 16 ans qui doit partir en mer comme mousse humilié et exploité pour nourrir son fils, ou ce père qui se vide de son sentiment et de son désir pour partir au travail - et le renouvellement fatal de cette expérience :

aujourd'hui est arrivé mon tour, de faire trajet jour après jour
vers l'entreprise qui m'engage, pour travailler 8heurs par jour
alors chaque matin, je me lève a 6 heures pour payer l'appartement
j'enfile mon bleu mécaniquement, pour aller gagner cet argent

a me voir naturellement mettre ma tenue de boulot et boire mon café chaud
alors désormais je comprend
.

On trouve aussi chez Priscilla une expression de la révolte, la révolte face aux chaînes qui ont entouré les hommes, si éloignées des promesses de la République . Ces promesses citées avec un mélange de regret de l'utopie et d'ironie cinglante :

Si j’enrichis un peu mon vocabulaire, un jour peut être je serais milliardaire .

Révolte face à la douleur des relations humaines, face aux situations bloquées, à l'incommunication :

arrachons donc notre linceul
qui nous accable nous oppresse
jusqu'à tomber à la renverse


Et cette expression de l'enfermement par l'argent, frappante, qui mériterait d'être lue par une enfant au concours de poésie du Rotary Club :

J'ai pensé t'emmener
Plus loin que la lumière,
Au delà du désert,
Pour voir d'autres forêts,
Monter haut dans le ciel,
T'évader un moment,
Juste quelques instants,
Voyager couleur miel,

Mais je n'ai que seize ans,
Et ne sait comment faire,
Pour t'emmener voir la mer,
Sans quelques pièces d'argent
.

Mais plus que tout, c'est ce jugement sur la domination par le Spectacle que j'ai trouvé remarquable, comme vision de l'utilisation des médias pour la domination des hommes : Les technologies libèrent les classes dominées au départ, les nourrissent, et c'est aussi vrai . Puis elles les écrasent .

Je ne pense pas que la télévision soit MAL, elle n'est tout simplement plus un simple divertissement qui était rare il y a encore quelques années en arrière. Elle ne nous permet plus de seulement voir à distance. Elle est employée désormais pour d'autres buts bien plus vicieux. elle ne remplit plus le but pour laquelle elle a été inventée . Tout comme le téléphone portable qui aujourd'hui nous nourrit .

Enfin, dans toute la musique que j'ai découverte par ces quelques mots, je me suis senti frère aussi de ce château de l'âme, exprimé avec un tel mélange d'enfance et de maturité :

Ni la mode, ni la société, ni le regard des gens, ni ma famille, ni mes connaissance, ni la drogue, ni le tabac, ni la télévision, ni le téléphone portable, ni les boites de nuit, aucunes maladies, aucuns soucis d'argent, aucun problème de religion, de territoire, aucune guerre, aucun conflit, rien de matériel, ni l'horoscope, ni les planètes, ni les pucerons, ni les abeilles, ni aucune force quelconque de la nature, pas de tremblement de terre, de dégâts des eaux, de coulée de laves, pas d'enfant, pas de mari, pas d'amour raté, ni manque de nourriture, ni d'eau, ni même les serpents ou les araignées ne gâchent ma vie.

Je ne doute pas que dans les premiers temps de l'URSS, on aurait permis à Priscilla de devenir poétesse, poétesse ouvrière, par la vie intérieure qui s'écoule parfois encore maladroitement dans ces mots . La poésie la plus puissante est l'élaboration d'une expérience vécue – sans la vie profonde qui permet la grâce, c'est à dire en notre âge le sentiment du vide, toute poésie, même la plus savante est l'expression du vide, le règne du vide . Je n'en donne pas d'exemple .

Je ne veux pas polémiquer, parler avec amertume, alors même que Priscilla ne montre pas d'amertume . Je dis simplement que quand la poésie, les mots, sont les compagnons secrets d'un être humain depuis si longtemps, et que cet être humain ne peut espérer pour ainsi dire aucune reconnaissance de l'école, des professeurs de littérature, il y a là l'occasion de se souvenir de l'homme, et de ces mots d'Hamlet :

Il y a quelque chose de pourri au Royaume du Danemark .

Je publie Priscilla avec fierté . Pardonne moi, jeune poétesse secrète, de ne pouvoir t'offrir davantage . Mais même si cela arrive dans ta vie, ne renonce pas à tes mots, fait nous les connaître, approfondis toujours ton art qui sert ton âme, et ton âme qui sert ton art .

Et beau printemps .



Textes


Sur l’étagère de mes souvenirs j'ai déposé ton odeur,
a chaque chose une place, la tienne est dans le cœur
d'une fillette mal définie
d'un garçon incompris

à tabous égaux, nous conversons longtemps
avec nos peu de mots, on se comprend
même si
nous aussi

on rêve d'un monde en 8 dimensions
tout changer
ne rien toucher
a nous deux on sonde jusqu'à incompréhension

afin de définir nos goût nos désirs
est il bon
est il mauvais
de ne pas savoir choisir

on stagne, car on se cherche,
lui puis moi,
nous puis, on
fini par se tendre des perches


***


A croire que l'on se fâche
bien plus que l'on s'attache
a croire bien trop souvent
que c'est l'autre le méchant

a boire pendant des heures
a trouver des erreurs
dans tes gestes dans tes dires
on a arrêté de sourire

mais si tu pense qu'il est possible
qu'on recommence en plus sensible
et si tu crois vraiment en moi
réessayons une nouvelle fois

je ne veux plus que l'on s’engueule
arrachons donc notre linceul
qui nous accable nous oppresse
jusqu'à tomber à la renverse


***


Ni la mode, ni la société, ni le regard des gens, ni ma famille, ni mes connaissance, ni la drogue, ni le tabac, ni la télévision, ni le téléphone portable, ni les boites de nuit, aucunes maladies, aucuns soucis d'argent, aucun problème de religion, de territoire, aucune guerre, aucun conflits, rien de matériel, ni l'horoscope, ni les planète, ni les pucerons, ni les abeilles, ni aucune force quelconque de la nature, pas de tremblement de terre, de dégâts des eaux, de coulé de laves, pas d'enfant, pas de mari, pas d'amour raté, ni manque de nourriture, ni d'eau, ni même les serpents ou les araignées ne gâchent ma vie.


***


-le travail-

pendant longtemps, je l'ai vu, se lever comme par obligation
il enfilé sa tenue, qu'il portait que pour l'occasion
tous les matins il s'en allait loin de nous loin de notre foyer
pour aller gagner de l'argent dans un métier qu'il abhorrait

a le voir machinalement se raser et avaler sa chicoré
moi je m'en étonnais

aujourd'hui est arrivé mon tour, de faire trajet jour après jour
vers l'entreprise qui m'engage, pour travailler 8heurs par jours
alors chaque matin, je me lève a 6 heures pour payer l'appartement
j'enfile mon bleu mécaniquement, pour aller gagner cet argent

a me voir naturellement mettre ma tenue de boulot et boire mon café chaud
alors désormais je comprend

si mon père se levait, sans rechigner
c'était pour construire notre logis
et à chaque repas être nourri
voilà ce que sa volonté m'a enseigné
25-02-2012


***


-haïku-
Ce qui se vendra,
Tiendras toujours dans la main
Jamais dans le cœur
--------------------------------------------
Les larmes de pluie
Coulent sur mes joues rosées
Le ciel s’éclaircit
----------------------------------------------
L'odeur d'un été,
Transmet son parfum douceâtre
A l'humanité


***


-réflexion-

On l'a jugée car elle ne respectait pas la loi. Aujourd'hui nous jugeons cette fameuse loi qui à l'époque semblais naturelle. Allons nous comprendre que le jugement n'est basé que sur des valeurs temporelles. Nos lois nous ressemblent, changeantes. Le vent tourne et elles aussi. Pourquoi désormais sommes-nous jugés car nous portons un juge en nous ? Vulgarité. Pourquoi alors nous interdisait-on jusqu'au cours du XXème siècle de porter le pantalon ? Finalement tout chose à ses bons et mauvais côtés. Comment peut on s'attarder sur une tenue vestimentaire, pour quelles raisons nous force t on au sein de certains groupes de porter uniquement l'un ou l'autre. Est ce l'image que nous renvoyons que vous essayez de maîtriser ou simplement nous que vous souhaiter cadrer ? Est ce si gênant de laisser des libertés à autrui ? Quel est le but recherché lorsqu'on qu'on nous interdit la jupe ou le pantalon ? Nous empêcher de penser ?
Il est beaucoup plus simple d'emmener un troupeau de mouton dans un même champs qu'une poignée d'écrivains aux mêmes idées. Auriez vous sollicité la facilité ?


***


Après tous ce que les peuples du monde se sont fait subir mutuellement, après se que l'on nous fait subir chaque jours pensez vous réellement que nous ne faisons rien subir à autrui? Aucun être humain ne peut se juger lui même comme étant entièrement dans le bien, le bon, le juste. . .
Je ne crois pas en des inventions purement négatives, l'homme est créateur. c'est pourquoi je ne pense pas que la télévision soit MAL, elle n'est tout simplement plus un simple divertissement qui était rare il y a encore quelques années en arrière. Elle ne nous permet plus de seulement voir à distance. Elle est employée désormais pour d'autres buts bien plus vicieux. elle ne remplit plus le but pour laquelle elle a été inventée. Tout comme le téléphone portable qui aujourd'hui nous nourrit.


***


Comme elle m'a dit, si elle meurt aujourd'hui elle sait qu'au temps passé, elle aura tout pris .
Je crois bien que moi aussi .

J'offre du rêve à temps partiel, c'est plus qu'une rencontre, lorsque je leur montre, qu'avec un cœur on peut toucher le ciel.

Parfois on me dit qu'ici c'est bien trop joli, alors j'aimerais pouvoir répondre qu'ailleurs il n'y fait pas forcément plus gris.

J'ai découvert encore hier, qu'un costume cravate sait aussi mettre des savates .

Si j’enrichis un peu mon vocabulaire, un jour peut être je serais milliardaire .

On m'a fait croire que d'un gentil on peut faire un méchant, moi je pense qu'à un nounours on donne pas un éléphant.

Des fois on ne nous donne pas la solution ce n'est pas pour autant qu'il faut attendre là comme un con .

On m'a dit le voyage forme la jeunesse, je viens de comprendre pourquoi il y a toute cette vieillesse, certains auraient ils oubliés d'aller un peu se balader ?


***


C'est une sculpture,
Créée dans du marbre,
Aux douces courbures,
Qu'elle seule peut avoir;

Ses cheveux bruyants
Chantant dans le vent ,
Parsemés de fleurs,
Aux milles couleurs;

Emplissaient mon cœur,
De joie;
Et chassaient mes peurs,
Ô Léa

Et ses doigts très fins,
taillés par Rodin,
Étaient d'une beautés,
Qui m'émerveillait;

Ses mouvements légers,
Souples et singuliers,
Sont pleins de poésie,
Sans avoir appris;

Chacun de ses gestes ,
Chacun de ses mots,
Et toutes les fêtes,
Et tout ses cadeaux;

Emplissaient mon cœur,
De joie;
Et chassaient mes peurs,
Ô Léa


***


J'ai pensé t'emmener
Plus loin que la lumière,
Au delà du désert,
Pour voir d'autres forêts,
Monter haut dans le ciel,
T'évader un moment,
Juste quelques instants,
Voyager couleur miel,

Mais je n'ai que seize ans,
Et ne sait comment faire,
Pour t'emmener voir la mer,
Sans quelques pièces d'argent.

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